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Plus j'avance dans ma connaissance (livresque) du violon et de son enseignement plus je réalise à quel point cette fameuse Chaconne est une sorte de totem pour les violonistes. Hier je feuilletais le bouquin "10 ans à la classe de violon" de Galpérine/Haas et j'ai vu qu'ils préconisaient de ne pas aborder la chaconne avant la 14ème année d'étude! après même le concerto de Beethoven! Or je n'ai pas l'impression que ce soit la difficulté technique de la Chaconne qui pose problème mais bien une espèce de "déférence" extrème vis-à-vis de cette oeuvre qui interdirait de mal la jouer ou du moins pas suffisamment bien. Un totem quoi! Qu'en pensez-vous?

PhilippeB a écrit :mais bien une espèce de "déférence" extrème vis-à-vis de cette oeuvre qui interdirait de mal la jouer ou du moins pas suffisamment bien.

Certains n'ont pas ces scrupules...

On avait commenté cet enregistrement il y a déjà quelques temps, là : topic8258.html
La question de Philippe m'y a fait repenser...

Quelle mémoire !
Je ne m'en rappelais plus du tout....

Ah la chaconne !!!
Mais oui un totem,cette sorte d'inaccessible étoile.
Une vie à passer sur cette œuvre vraiment.
Ce genre de kaléidoscope ou à peine vous tournez l'objectif et d'autres mondes semblent apparaitre.
J'ai tourné autour bien des années,la travaillant un peu par ci pour par là,la méditant,la jaugeant,elle faisant son travail parfois à mon insu.
Je l'ai joué en concert seulement l'an dernier pour la première fois.Oh j'ai et j'avais tout le "bagage nécessaire"depuis longtemps pour l’interpréter au moins aussi correctement qu'un grand nombre de professionnels mais.....J'en voulais beaucoup,énormément,donc...
Évidemment que c'est un graal et y compris techniquement !
Tel violoniste aguerri aux caprices de Paganini et se retrouvant quasi hors souffle là.
La main gauche sollicitée dans toutes ces doubles cordes,la pureté de l'intonation absolument détectable en permanence.
Mais l'archet,cette technique bien au delà des ricochets,staccatos et autres fantaisies.L'archet nu et dans sa vérité,le contact à la corde qui peut ou non être capable d'aller chercher ce son,cette vibration profonde du violon,
La polyphonie,tout est résumée dans ce mot concernant la difficulté de la chaconne...4 doigts et un archet mariant en permanence doubles cordes,détachés variés,et surtout ces courbes permanentes mariées à la ligne droite pure.
Je dirai,la pureté technique nécessaire est particulièrement complexe à obtenir,et aussi les intentions musicales,leur noblesse ou leur médiocrité,tout va s'entendre.
J'oserai dire,sans doute une des œuvres ou en tout cas pour moi,l’œuvre majeure de la musique classique occidentale.
Chaque note porteuse de sens profond.
Puis au delà de ses difficultés intrinsèques,pour Philippe....se rappeler de cette sentence de Schnabel à propos des sonates de Mozart...'trop facile pour un enfant,trop difficile pour un adulte"....à méditer.
Tout jeune,mes deux vrais amours,mes ambitions les plus absolues furent cette chaconne et le concerto de Beethoven là ou d'autres rêvaient Paganini ou Tchaïkovski.
En vérité c'était moi le plus présomptueux et prétentieux et il me semble n'avoir jouer d'autres choses que pour mieux me préparer à ces rencontres décisives et telluriques.

belle description de la chaconne ! mon objectif est de pouvoir l'accrocher un jour ou l'autre. De longues heures à user mon archet vont m'être nécessaires, mais quel bonheur de se dire que rien n'est inaccessible !

C'est marrant, parce que cette chaconne ne fait pas (et n'a jamais fait) partie de mes "Graal".
Dans les sonates et partitas, c'est plutôt la fugue de la 1ère sonate qui en fait office, pour moi.

Même si je sais que, que ce soit pour la chaconne ou la fugue, je n'aurai probablement jamais le niveau pour en faire ne serait-ce que quelque chose d'écoutable...

Merci habanera pour cette vibrante description! Cette Chaconne exerce une facination incroyable dès les premiers accords et je réalise à quel point c'est un des morceaux les plus emblématiques du répertoire du violon. Je ne crois pas qu'il y ait d'équivalent dans le répertoire de piano d'une oeuvre suscitant une telle vénération et autant de scrupule à l'aborder sans être suffisamment armé techniquement et musicalement. Peut-être la sonate en si mineur de Liszt, mais à part ça je ne vois pas...

la lettre à Elise ?

Maximus a écrit :la lettre à Elise ?

Haha !
Une prof de piano racontait une fois qu'une jeune élève lui avait annoncé sans préavis qu'elle arrêtait les cours.
Elle ne comprenait vraiment pas pourquoi, d'autant que l'élève semblait venir avec plaisir.
Jusqu'à ce que les parents lui expliquent :
"vous comprenez, quand elle a commencé le piano, c'était dans le but d'arriver un jour à jouer la lettre à Elise. Maintenant qu'elle l'a travaillée avec vous, elle n'a plus de raisons de prendre des cours"...

Heu l'équivalent violon de la lettre à Elise, ça serait plutôt le canon de Pachelbel ou un truc dans ce goût là... le truc super galvaudé que tous les gamins doivent jouer à leur parent (non musicien) pour montrer que les cours servent à quelque chose... Perso jamais jouée. Je suis passé directement à l'opus 111

mon morceau de piano préféré, c'est le clavier bien tempéré. c'est le seul truc que j'aimerais savoir jouer sur cet instrument à percussion barbare

Maximus si tu es du style Bach addict, la chaconne de Bach adaptée pour le piano par Busoni est également une pièce qui peut être très émouvante. J'avais eu l'occasion de l'entendre en live il y a deux ans par la pianiste Yumeko Mochizuki, en plus c'était dans un bâtiment très ancien avec une sorte de cloître, c'était l'été, les fenêtres étaient ouvertes. J'en ai gardé le souvenir d'un moment assez magique, Je redécouvrais Bach. j'aurais voulu mettre un lien mais le seul enregistrement que j'ai commencé à écouter sur you tube ne m'a pas convaincue,est-ce parce que ce n'est pas du live, pas la même interprète ou parce que je venais d'écouter l'original?

Merci habanera pour ton beau témoignage sur cette oeuvre.

je ne connais, je fonce voir. merci !