tisseranne a écrit :
Première question toujours sur les modes: j'avais rencontré il y a bientôt un an une jeune harpiste (harpe de concert) qui composait également, et qui disait qu'elle était plus tournée vers la "musique modale". Je croyais avoir compris ses explications, mais quand j'ai écouté son CD par la suite... j'avais pas dû comprendre. C'était très "contemporain", à mon oreille ça partait un peu dans tous les sens... Moi je n'arrivais pas à repérer le moindre mode qui m'aurait donné l'impression de retomber un peu sur mes pieds. Mais ça vient peut-être de moi. Alors, ça veut dire quoi, à ton avis, de la musique modale (moderne) ?
Il faut se méfier de ce que disent les compositeurs sur leurs propres oeuvres. C'est parfois n'importe quoi.
En général, par "modale", on entend "avec une autre échelle que la gamme tonale", c'est-à-dire avec d'autres intervalles (souvent avec l'absence de sensible). Citons en vrac, le mode pentatonique (5 notes issues du cycle des quintes, exemple: do-ré-mi-sol-la), typique "chinois", qu'on trouve chez Ravel, Debussy, par exemple. Les modes à transposition limitée de Messiaen (le mode 2, par exemple, qui alterne ton, 1/2 ton, qu'on trouve chez Debussy, Chostakovitch entre autres). Les modes orientaux avec des secondes augmentées, ou des intervalles très expressifs (certaines musiques tziganes, nord-africaines).
Mais il y a une telle profusion d'échelles non-tonales dans le monde, qu'on peut à peu près tout trouver: Un mode iranien ou l'octave est divisée en 29 (NB: la gamme chromatique, c'est 12!), un mode africain ou l'octave est divisée en 7 parties égales! (mais le langage est essentiellement rythmique dans ce cas particulier)
tisseranne a écrit :
Deuxième question : eh bien puisque tu parles de cadence... cette histoire de cadence, j'en ai déjà entendu parler. Alors il y avait une histoire d'octave et de sixième... (de mémoire...) Si tu peux m'en dire plus.
Quelle cadence? A la Renaissance?
Allons-y pour la Renaissance!
A une voix, on finit en général par une seconde descendante, exemple:
fa-mi-ré.
A deux voix, il faut finir par une consonance parfaite (octave, unisson) car la fin est un point de repos, où l'on place un intervalle le plus stable possible.
On fait précéder cette intervalle par "la consonance imparfaite la plus proche". En clair, on joue sur la force d'attraction de certains intervalles.
Parenthèse:
Faites l'expérience vous même:
Une sixte mineure, comme mi-do, il y a une attraction vers la quinte mi-si, l'intervalle n'est pas très stable, et il a une certaine "orientation" vers l'intérieur (autres possibilités, aller vers fa-do, fa-la, sol-si...)
Une sixte majeure, c'est plutôt vers l'extérieur (ré-si attire do-do, ou la-do, do-mi, etc...)
Pour mieux faire sentir la fin comme fin, on fait précéder l'intervalle reposant par l'intervalle le plus tendu à disposition à l'époque.
fa-mi-ré, sera donc accompagné par la ou ré-do#-ré. Le retard du ré, au-dessus du mi, renforce cette tension et du même coup, le sentiment de détente après.
A partir de 3 voix, on peut ajouter ré-la-ré par exemple, à la basse, ce qui donne la cadence qui sera analysée après comme "enchainement du Vème au Ier degré", dans le langage tonal.